vendredi 16 novembre 2012

Les affligés

Les Affligés de Chris Womersley

Voici un roman que j'ai dévoré et donc adoré, de part son ambiance sombre et mystérieuse et son écriture magnifique, à la fois dure et poétique.


On est en 1919, le jeune Quinn revient dans le comté de Flint en Australie, dix ans après avoir fuit son pays étant adolescent suite à des accusations terribles portées contre lui. Il a, durant tout ce temps, erré à travers le monde et combattu au front pendant la grande guerre en France d'où il revient profondément marqué et partiellement sourd.
Il revient pour faire face à son passé, aux accusations monstrueuses dont il est victime. Il vit en fugitif, son père et son oncle ayant juré de lui faire la peau s'ils le revoyaient. Il se cache donc à proximité de la maison familiale où il épie ses proches et rend visite en cachette à sa mère gravement malade de la grippe espagnole. 
Il fait la rencontre d'une étrange fillette de 12 ans, orpheline et pourchassée elle aussi, qui vit de menus larcins. Tous deux apprendront à faire face ensemble, en se cachant dans les collines, la fillette le poussant à se venger de l'homme à l'origine de leurs persécutions. Il se prendra d'affection pour cette fillette espiègle et débrouillarde qui lui rappelle tant sa jeune soeur disparue  et la jeune Sadie verra en lui la figure du grand frère parti à la guerre dont elle attend désespérément le retour.  

Les références à l'Histoire sont nombreuses, l'auteur décrit avec justesse les atrocités de la Grande guerre qui hantent les nuits de ce jeune soldat, et les désastres sur toute une population : enfants orphelins, soldats mutilés, familles détruites. S'ajoute à cela une épidémie de grippe espagnole qui fait des ravages. La peur et la mort sont omniprésentes.

Chris Womersley alterne passages décrivant le retour difficile de ce soldat dans sa contrée d'origine avec des ellipses sur ce qu'il a vécu durant la guerre et d'autres sur le terrible évènement qui l'a amené à fuir dix ans plus tôt.
En mettant bout à bout ces trois époques de narration avec brio, l'auteur construit un roman majestueux qui se transforme vite en véritable polar,  créant une ambiance digne des romans de RJ Ellory : sombre et mélancolique.
Un roman beau, dur, émouvant.

Quelques citations :

"La guerre, avait-il découvert, gâchait vos cinq sens : s'il fermait les yeux pour ne plus voir les cadavres ensanglantés et les arbres déchiquetés, il entendait encore les armes et les hurlements ; s'il se bouchait les oreilles, il sentait encore la terre trembler ; l'odeur du gaz imprégnait ses narines ; tout ce qu'il touchait était humide ou sanglant. Même dans son sommeil, il rêvait d'éclairs, de vêtements déchirés, de grommellements. Cela n'en finissait pas."

"Survivre à une tragédie, c'est apprendre qu'on ne pourra pas toujours s'en tirer, et savoir cela était à la fois une délivrance et une tristesse"

"Et en effet, telle une rivière dont les eaux montent, Quinn sourit. Mystérieusement, et il valait sans doute mieux ne pas savoir comment, ils s’étaient mutuellement fait surgir du néant. Il en ressentit un étrange frisson de plaisir"

Les affligés / Christ Womersley . - Ed. Albin Michel, 2012

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